épisode 31 (human milk, histoire de vampires)
Sa Philomène avait commencé à dépérir sous ses yeux. Elle brûlait d’un feu qui allait la tuer. Il avait suivi les essais de contamination de certaines familles de rescapés d’esclaves et toutes s’étaient éteintes de la maladie. Les gènes de sang de vampires ne les protégeaient pas du virus. Il n’avait plus qu’à l’entourer d’affection et à la regarder mourir.
Il avait fallu l’arrivée de Viktor pour que la donne soit totalement chamboulée. Ce scientifique renommé avait continué les prélèvements sur la femelle sans se douter de la surveillance dont il faisait l’objet. Marcel ne l’avait pas interrompu, il avait repris ses esprits et choisi de regagner l’anonymat de son état. Il ne pouvait plus rien faire pour empêcher la mort de Philomène. Il maintiendrait une discrète attention afin qu’elle ne souffre pas inutilement et qu’elle parte en douceur, entourée de ses parents et amis. C’est pourquoi, quand il avait ressenti les secousses et les ondes envoyées par le cerveau de Viktor lors de la fusion, il avait accouru au secours de sa protégée.
Soudain il fit un bond dans son fauteuil ! Il devait être devenu fou, contaminé par ce cinglé de Viktor ! Ses sens lui jouaient-ils des tours ? Il aspira longuement et du se rendre à l’évidence, il ne sentait plus les effluves de la maladie ! Ces miasmes indécelables pour un simple odorat humain entouraient Philomène depuis des semaines. Il ne pouvait la croiser sans diagnostiquer à leurs relents de plus en plus présents, l’avancée inéluctable du mal qui allait finir par l’emporter et là, plus rien ! Viktor aurait-il trouvé le moyen de sauver la race des vampires ?
Il se leva et se dirigea vers le salon dont ne lui parvenait plus aucun bruit depuis quelques minutes. Il ouvrit la porte sans précaution et retrouva les deux nouveaux liés, endormis. Viktor entrouvrit un œil au fracas de la porte heurtant le mur. Son grand corps entourait celui de Philomène qui reposait, toujours revêtue de son peignoir, et sur les lèvres un sourire apaisé. Leurs cous montraient des traces de sang. Les blessures, par lesquelles ils s’étaient mutuellement abreuvés, cicatrisaient déjà en luisant doucement.
Le grand vampire s’étira lentement et tout en exhibant ses crocs en un rictus d’intimidation, feula doucement en regardant l’ombre dressée devant lui. Il resserra l’emprise de ses bras, opposant son corps à toute tentative visant à lui subtiliser sa compagne.
Marcel ne s’embarrassa pas de subtilités et d’un grand coup de poing dans la mâchoire de l’apprenti guerrier, lui referma brutalement la bouche sur ses dents, affutées comme des rasoirs. Viktor gémit sous la morsure qu’il venait de s’infliger et porta les mains à ses lèvres pour tenter d’endiguer le flot de sang qui coulait. Une rigole lui descendait le long du menton, goutant sur le visage de la jeune femme. Inconsciemment, en sentant le précieux liquide toucher ses lèvres, Philomène ouvrit la bouche et les lécha. Instinctivement Viktor l’embrassa alors afin qu’elle boive à la source.
Marcel gémit de dépit devant ses deux inconscients qui ne pensaient qu’à fusionner tant et plus ! Il ne serait pas facile de les désunir et il patienta quelques minutes, le temps pour Viktor de ne plus saigner et de pouvoir s’éloigner de Philomène. Au premier signe de répit, L’ombre qui planait au dessus d’eux se saisit du vampire enamouré par la peau du cou, le décolla et d’un geste qui ne sembla pas lui coûter beaucoup d’effort, l’envoya valser, une fois de plus, à travers la pièce.